CLAUDE COUTAZ AVOCAT
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le bLOG

Regroupement familial: attendre longtemps ou agir vite!

7/4/2020

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Le Conseil constitutionnel a posé comme principe que le droit pour les étrangers de mener une vie familiale normale « comporte en particulier la faculté pour ces étrangers de faire venir auprès d’eux leurs conjoints et leurs enfants mineurs sous réserve de restrictions tenant à la sauvegarde de l’ordre public et à la protection de la santé publique, lesquelles revêtent le caractère d’objectifs de valeur constitutionnelle » [1].
En pratique, pour se faire rejoindre par sa famille quand on est étranger, il faut savoir être patient. Mais pas trop tout de même...
A juste titre, la Halde (Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité) contestait le caractère particulièrement restrictif des conditions de regroupement familial telles qu’elles résultent de la législation française, et tout particulièrement de celle tenant aux ressources stables et suffisantes [2].
Depuis 2004, le regroupement familial est devenu le motif le moins courant d’immigration familiale.
Ceci s’explique par le fait que, depuis 2003, le nombre d’étrangers non communautaires admis au séjour dans le cadre du regroupement familial a considérablement chuté.
Un de ressort de dissuasion du respect de la procédure de regroupement familial est la durée d’instruction des demandes qui atteint généralement une ou plusieurs années.
Pourtant la procédure de regroupement familial est encadrée par la loi et le délai imparti à l’administration pour instruire les demandes faites à l’OFII (Office Français de l’Immigration et de l’Intégration) est de 6 mois.
L’article L421-4 du CESEDA prévoit en effet que « l’autorité administrative statue sur la demande dans un délai de six mois à compter du dépôt par l’étranger du dossier complet de cette demande ».
Passé ce délai de 6 mois, on peut considérer que la demande a été refusée et qu’une décision implicite de rejet est née.
On a alors 2 mois pour saisir le tribunal administratif d’un recours.
Bien souvent, les étrangers attendent patiemment la réponse de l’administration.
Lorsqu’ils s’enquièrent de leur dossier auprès de l’administration, il leur est fréquemment indiqué qu’il faut attendre car le dossier serait en cours d’instruction, ce qui est souvent exact.
Mais il ne faut pas attendre trop.
D’abord parce que pendant ce temps, la famille est séparée injustement alors que la loi prescrit qu’elle soit réunie lorsque les conditions sont remplies.
Ensuite, parce qu’il n’est pas rare que les demandes soient traitées 2 ans après leur dépôt et si on attend trop, on ne peut plus saisir le tribunal.
En effet, en application des articles R. 421-1 et R. 421-2 du code de justice administrative, le délai de recours contentieux est de deux mois à compter de la notification de la décision attaquée ou, en cas de décision implicite de rejet, deux mois à compter du jour de la naissance de ladite décision implicite.
Toutefois, l’article R. 421-5 du code de justice administrative dispose que : « les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours dans la notification de la décision ».
Le Conseil d’Etat a précisé les dispositions de l’article susmentionné : « Il résulte de ces dispositions que cette notification doit, s’agissant des voies de recours, mentionner, le cas échéant, l’existence d’un recours administratif préalable obligatoire ainsi que l’autorité devant laquelle il doit être porté ou, dans l’hypothèse d’un recours contentieux direct, indiquer si celui-ci doit être formé auprès de la juridiction administrative de droit commun ou devant une juridiction spécialisée et, dans ce dernier cas, préciser laquelle » [3].
Or bien souvent l’attestation délivrée à l’étranger qui indique la date d’enregistrement de la demande de regroupement familial, si elle mentionne le délai de 6 mois pour qu’une décision implicite naisse, et le délai de 2 mois pour la contester, ne précise pas la juridiction compétente de manière suffisamment précise ni si un recours préalable est nécessaire ou simplement possible puisqu’elle mentionne juste : "vous disposerez d’un délai de 2 mois pour contester cette décision selon les voies de recours habituelles (recours, gracieux, hiérarchique ou contentieux)".
Par conséquent, le délai de recours de 2 mois ne peut être opposé au requérant faute de précision suffisante dans l’accusé de réception de la demande de regroupement familial formulée.
Si l’indication selon laquelle le recours peut être formé devant un tribunal administratif suffit à satisfaire à l’exigence de mention des « voies de recours », sans qu’il soit nécessaire, ni de préciser le tribunal compétent au sein de la juridiction administrative [4], ni, a fortiori, l’adresse de ce tribunal [5], en revanche, l’indication des voies et délais de recours doit à tout le moins mentionner l’ordre juridictionnel compétent, et, au sein de la juridiction administrative, le cas échéant, la juridiction spécialisée compétente.
Dans un arrêt du 24 octobre 2019 [6], la Cour administrative d’appel de Lyon rappelle utilement ces règles et annule le jugement du tribunal administratif de Grenoble qui avait considéré irrecevable car tardive la requête d’un étranger en s’appuyant sur la mention sur l’attestation de dépôt délivrée par l’OFII.
La Cour estime que le délai de 2 mois pour contester l’absence de réponse de l’administration dans le délai de 6 mois après l’enregistrement de la demande de regroupement familial n’est pas opposable.
Il faut dire que dans cette espèce, comme souvent, la préfecture interrogée à plusieurs reprises par le requérant lui avait indiqué de ne pas tenir compte de ce délai de 6 mois et d’attendre car il y avait du retard dans le traitement du dossier.
L’étranger pouvait penser à bon droit que le délai de 6 mois puis de 2 mois n’était pas impératif voire qu’une décision de rejet n’était pas née.
Quand bien même aurait-il compris qu’une décision implicite de rejet était née et qu’il pouvait la déférer à la juridiction, les voies de recours indiquées dans l’attestation de dépôt de sa demande de regroupement familial étaient tellement peu précises qu’il ne lui était pas possible de savoir ni l’ordre juridictionnel compétent, ni au sein de la juridiction administrative, le cas échéant, la juridiction spécialisée compétente.
Ainsi l’étranger qui aurait attendu la réponse à sa demande de regroupement familial un peu plus que les 6 mois réglementaires accordées à l’administration pour la traiter et les 2 mois pour saisir le tribunal pourrait-il quand même agir en justice pour obtenir une réponse à sa demande de regroupement familial.
Attention toutefois à ne pas attendre trop.
En effet, on a un an pour agir contre l’absence de réponse à une demande de regroupement familial après le délai de 6 mois dont dispose l’administration pour traiter la demande.
Dans cet arrêt, la Cour administrative d’appel rappelle que "le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l’effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d’une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l’obligation d’informer l’intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l’absence de preuve qu’une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d’un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l’exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu’il en a eu connaissance."
En résumé, quand on dépose une demande de regroupement familial, il faut attendre 6 mois avant de pouvoir saisir le juge si on n’a pas reçu de réponse.
On peut attendre un an après ce délai de 6 mois mais si on attend davantage, on ne pourra plus se plaindre de ce que l’administration n’a pas répondu à la demande de regroupement familial.
18 mois après le dépôt d’une demande de regroupement familial qui n’aurait toujours pas reçu de réponse, on ne peut plus saisir le juge, sauf circonstances particulières.
S’il faut donc être patient pour être rejoint par sa famille lorsqu’on est étranger, il faut ne pas trop attendre quand la demande de regroupement familial n’a toujours pas été acceptée après un délai de 6 mois.


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Coronavirus, confinement et étrangers avec ou sans titre de séjour

20/3/2020

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Les préfectures ont donné les informations utiles aux ressortissants étrangers qui avaient rendez-vous en préfecture soit pour le dépôt d'une demande de titre de séjour soit pour le renouvellement de leur titre de séjour (cartes de séjour, cartes de résident, récépissés de demande, attestation de dépôt).

Compte tenu du contexte actuel de crise sanitaire, tous les rendez-vous attribués (pour le dépôt d'une 1ère demande de titre de séjour ou un renouvellement) à compter du 16 mars 2020 sont annulés jusqu'à nouvel ordre ; aucun accueil physique ne sera assuré en Préfecture et sous-préfecture, et aucun nouveau rendez-vous ne pourra être proposé.

Si vous bénéficiiez d'un rendez-vous confirmé pris après cette date, vous serez recontacté ultérieurement par courriel.

Dans l'attente de l'évolution de la situation, tous les documents donnant droit au séjour (visa long séjour, récépissé, autorisation provisoire de séjour, titre de séjour, attestation de demandeur d'asile) et expirant après le 16 mars sont automatiquement prolongés de trois mois. Tous les droits associés (droit au travail notamment) le sont également.

Le calendrier des rendez-vous en ligne sur le site internet de la préfecture n'est plus disponible pour le moment.

Les personnes sont invités à consulter régulièrement le site internet de la Préfecture pour vous tenir informé de la réouverture des services et des calendriers de rendez-vous.

Il est donc permis de sortir de chez soi (dans les limites du confinement actuel bien sûr) avec son titre de séjour, récépissé, attestation de dépôt même s'il a expiré.
​
En cas de contrôle de police, ayez surtout l'attestation de déplacement dérogatoire sur vous, c'est l'essentiel!

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La carte de séjour « passeport talent » : rendre la France plus attractive, c’est bien, mais avec une mobilité géographique, c’est mieux.

3/3/2020

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Les cartes de séjour « passeport talent » créées par la loi du 7 mars 2016 ont pour ambition de « rendre le territoire national plus attractif pour les talent internationaux ». Mais permettent-elles une mobilité géographique en Europe ou dans le monde sans risque de perdre des droits ?

Facilité de délivrance, dispositif spécifique d’accueil dans les préfectures pour les personnes concernées, durée de validité pouvant aller jusqu’à 4 ans (renouvelable), dispense de passer par la DIRECCTE pour une autorisation de travail ou de passer par la procédure de regroupement familial pour être rejoint par sa famille : tout est fait pour faciliter la vie de l’étranger, et celles des entreprises pour lesquelles il travaille aussi.
La gamme de cartes "passeport talent" est vaste : salarié qualifié, salarié hautement qualifié, salarié recruté par une entreprise dite innovante, salarié en mission, chercheur, projet de création d’entreprise, projet innovant reconnu par un organisme public, investisseur, mandataire social, personne à renommée internationale, profession artistique et culturelle, passeport talent famille.
Les conditions de leur attribution sont détaillées ici.
Tout est fait pour attirer le "talent" étranger mais il faut encore, pour le faire rester, lui permettre d’inscrire son séjour dans la stabilité sans restreindre son parcours professionnel.
Or à l’épreuve des faits, les cartes « passeport talent » ne permettent pas toutes une grande mobilité puisqu’il faut, pour l’étranger qui en est titulaire, ne pas s’absenter de France plus de 6 mois consécutifs dans l’année, sans non plus dépasser un total de 10 mois, pour ne pas perdre ses droits au séjour de longue durée en France.
Cela peut parfois compliquer les carrières des étrangers concernés dont les missions exigent souvent d’eux une certaine mobilité à travers l’Europe ou le monde.
Un ingénieur recruté dans une start-up ou une grande entreprise française va sans doute être amené à occuper différents postes à travers le monde et doit pouvoir accepter les propositions qui lui sont faites sans risque pour son droit au séjour en France où il souhaite pouvoir revenir au terme de sa mission, obtenir une carte de résident, voire la nationalité française.
Seule la carte « passeport talent – carte bleue européenne » permet d’obtenir une carte similaire dans un autre pays de l’UE sous certaines conditions, puis de revenir en France où il sera alors de nouveau possible d’en obtenir une du même type.
Pour une entreprise qui souhaite envoyer la personne sur le continent américain, en Asie ou ailleurs dans le monde sans faire courir le risque à l’étranger de perdre son droit au séjour en France, cela peut être compliqué. Bien sûr à son retour en France, l’étranger s’il remplit toujours les conditions d’obtention de la carte « passeport talent » pourra toujours en demander une nouvelle.
Mais lorsqu’il part, l’étranger sait-il seulement quand il va revenir et s’il reviendra pour occuper les mêmes fonctions dans la même entreprise ?
Si les conditions d’obtention d’un passeport talent ne sont plus remplies à son retour, en cas de changement d’employeur notamment, il n’aura tout simplement pas la possibilité de revenir.

La question se pose donc assez rapidement de passer de la carte "passeport talent" à la carte de résident ou à la nationalité française.
En effet, seule la carte de résident d’une durée de 10 ans permet une mobilité satisfaisante pour les profils concernés puisqu’alors, il faut seulement veiller à ne pas passer plus de 3 années consécutives hors de France pour ne pas perdre son droit au séjour en France.
Or certaines de ces cartes de séjour « passeport talent » ne permettent pas d’obtenir une carte de résident de 10 ans (salarié en mission, passeport talent famille du salarié en mission).
Et certains visas "passeport talent" ne comptent pas dans la durée de présence en France ininterrompue qui doit être de 5 ans (projet économique innovant, chercheur, étranger à renommée internationale, salarié en mission, passeport talent famille du salarié en mission).
La plus favorable est la carte "passeport talent - carte bleue européenne” comme la durée d’absence du territoire peut aller jusqu’à 12 mois consécutifs et 18 mois au total sans conséquence pour la délivrance d’une carte de résident.
De même la durée de séjour dans un autre État de l’UE est comptée dans les 5 années de résidence ininterrompue exigée, mais il faut quand même avoir vécu en France les 2 années précédant la demande de carte de résident "longue durée - UE".
La délivrance d’une carte de résident est cependant facultative pour le porteur de la carte "passeport talent - carte bleue européenne” même si toutes les conditions sont remplies.
Enfin, se pose assez vite la question de solliciter la nationalité française qui, une fois obtenue, permet toutes les mobilités sans limite de durée ou de parcours professionnel.
Il faut cependant pour cela avoir passé au moins 5 années en France, ce qui ne permet normalement pas ces séjours même professionnels à l’étranger pour de trop longue durée.
L’accès à la nationalité française après 5 années de résidence régulière sous couvert d’une carte « passeport talent » est toutefois possible en dépit d’une interruption de séjour hors de France notamment si l’employeur de l’étranger pour lequel ce séjour a été effectué est une entreprise française ayant un établissement à l’étranger.
Dans ce cas, le séjour, même prolongé, à l’étranger ne devrait pas être un obstacle à la naturalisation.
La sécurisation du parcours des étrangers "talentueux" en France nécessite bien souvent la prise en compte de toutes ces règles complexes pour faire un choix éclairé au moment d’accepter une mobilité professionnelle potentiellement préjudiciable sur le long terme.

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Délit de solidarité: où en est-on de cette anomalie de la République?

6/4/2018

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Conviction, générosité, amour, humanité, nécessité, fraternité.

Ces mots, s’ils sont la seule motivation d’une personne qui aide un étranger à entrer ou à vivre en France, devraient suffire à empêcher la loi pénale de frapper comme elle le fait pourtant en France.

Le délit de solidarité a fêté ses 80 printemps le 2 mai 2018. Ce « délit de solidarité » trouve sa première définition dans le décret-loi du 2/5/1938 dans un climat particulièrement xénophobe sous le gouvernement Daladier. On dit « délit de solidarité », mais ce mot n’existe pas dans notre droit. Dans ce décret-loi, le délit est défini ainsi : « Tout individu qui par aide directe ou indirecte aura facilité ou tenté de faciliter l’entrée ou le séjour irréguliers d’un étranger sera puni d’une peine d’emprisonnement de un mois à un an ».

Le gouvernement vise dès l’origine les « trafics » autour de ces « étrangers indésirables ». C’est l’aide à l’entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers de l’article 12 de l’ordonnance du 2/11/1945, et de l’article L 622-1 du CESEDA désormais.

Le quantum des peines a été progressivement augmenté. Dans l’ordonnance du 2/11/1945, on ajoute la peine d’amende à la peine de prison (de 600 F à 12 000 F). Puis dans la loi du 10/7/1976, la peine de prison encourue est doublée tandis que la peine d’amende encourue passe de 2000 à 200 000 F. Sont ajoutées des peines complémentaires comme l’interdiction de séjour, la suspension du permis de conduire, la confiscation du véhicule, ou le retrait d'autorisation d'exploiter un service de transports. C’est à partir de la loi du 31/12/1991 qu’on arrive à la peine de 5 ans d'emprisonnement qui est la peine prévue encore aujourd’hui. Les peines complémentaires d’interdiction du territoire pendant 10 ans, d’interdiction professionnelle, et de confiscation des produits de l'infraction sont alors introduites dans la loi. Comme tout ça est motivé par la lutte contre les passeurs, employeurs, transporteurs et autres marchands de sommeil, on permet enfin et logiquement, par une loi du 20/12/1993, que le délit puisse être reproché aux personnes morales.

La définition de l’infraction n’a jamais été modifiée. Pourtant une aide directe ou indirecte à l’entrée, la circulation ou le séjour, c’est tellement de choses différentes et éloignées des trafics visés par ce texte. Louer un studio à un « sans papier », indirectement, c’est l’aider au séjour. Permettre qu’il recharge son portable, le prendre en stop, lui donner à manger, indirectement, c’est l’aider à circuler ou séjourner en France. Le 2/3/2004, le conseil constitutionnel a même dû préciser que les organismes humanitaires d’aide aux étrangers n’étaient pas des « bandes organisées » au sens de la loi pénale.

Des mouvements collectifs ont permis de freiner l’application aveugle de cette anomalie de notre République, anomalie parce que heurtant de plein fouet la « fraternité » de la devise.

Pourtant l’aide parfaitement désintéressée est aujourd’hui encore condamnable.

Parce que le législateur a toujours refusé avec force argumentation d’exclure par principe la condition tirée d’un « but lucratif » de l’aide apportée. De Charles Pasqua à Manuel Valls en passant par Jean-Pierre Chevènement, Nicolas Sarkozy ou Patrick Besson, ce sont, et encore avec Gérard Collomb aujourd’hui, les mêmes arguments.

On explique que les membres d’organisations terroristes doivent pouvoir être condamnés s’ils aident un des leurs même sans but lucratif de leur part, leur motivation étant « militante ». Ou encore que les réseaux de passeurs sans vergogne doivent pouvoir être démantelés et que chaque maillon de la chaine doit pouvoir être puni sans avoir à caractériser les versements d’argent ou avantages tirés, sous peine de neutraliser l’action de l’Etat dans sa lutte contre ces exploiteurs de la misère des étrangers.

Explications qui ne tiennent pas une seconde puisque sans ce bout de texte du CESEDA, on poursuivrait encore ces gens-là comme on le fait aujourd’hui avec les incriminations du code pénal telles l’association de malfaiteurs, la traite des êtres humains ou les crimes et délits terroristes.

D’ailleurs, pour l'aide au séjour, le droit de l’Union européenne impose seulement aux Etats de sanctionner pour le séjour les personnes qui agissent « à des fins lucratives ». Les autres Etats de l’Union qui ne sont pas allés plus loin que ça ne sont pas les maillons faibles de la lutte européenne contre les passeurs.
 
Sous la pression de mobilisations associatives, les personnes protégées contre des poursuites pénales ont été plus nombreuses.


C’est d’abord l’immunité familiale concernant les membres de famille de l’étranger qui ne peuvent plus être poursuivis pour leur aide (Toubon en 1996 l’accorde au conjoint, ascendant ou descendant de l’étranger ; Chevènement en 1998 l’accorde au conjoint des ascendants ou des descendants, frères et sœurs, beaux-frères et belles-sœurs et concubin.)

La loi du 26/11/2003 uniquement pour l’aide au séjour (pas à l’entrée ni à la circulation) inscrit dans le CESEDA l’immunité humanitaire, et elle concerne uniquement et restrictivement l’aide nécessaire à la sauvegarde de la vie ou de l’intégrité physique de l’étranger face à un danger actuel et imminent.

Et encore, on peut alors tout de même sanctionner si les moyens employés Sont disproportionnés par rapport à la gravité réelle du danger menaçant l’étranger secouru. De même, la poursuite pénale demeure possible en cas de contrepartie directe ou indirecte de quelque nature que ce soit (pas seulement financière donc).

Il a fallu un film de Philippe LIORET (« Welcome » sorti le 11/3/2009) pour que la polémique contraigne le ministre de l’Intérieur Besson à mettre sa touche juste cosmétique à l'immunité humanitaire en 2009 et remplace la condition de «sauvegarde de la vie ou de l’intégrité physique » de l’étranger par la « sauvegarde la personne ».

Ce sera finalement, le ministre Valls qui annoncera la "suppression du délit de solidarité" par la loi du 31 décembre 2012 comme elle vient à nouveau d’être annoncée à l’issue du vote de la « loi asile immigration » le 22/4/2018.

Alors où en sommes-nous de ce délit de solidarité? Existe-t-il toujours?

En réalité, le texte voté par l’assemblée nationale le 22/4/2018, et qui sera examiné par le sénat à partir du 19/6/2018, réalise à son tour un toilettage des immunités pénales prévues à l’article L622-4 du CESEDA.

Tandis que précédemment, elles ne concernaient que l’aide au séjour irrégulier, elles couvrent désormais également l’aide à la circulation, mais toujours pas l’aide à l’entrée.

Pour le reste, seule l’immunité humanitaire est modifiée à la marge.

L’immunité humanitaire concerne non plus seulement la « fourniture de conseils juridiques » mais la fourniture de « conseils et de l’accompagnement, notamment juridiques, linguistiques ou sociaux ».

Elle concerne toujours également les « prestations de restauration, d’hébergement ou de soins médicaux destinées à assurer des conditions de vie dignes et décentes à l’étranger, ou bien toute autre aide visant à préserver la dignité ou l’intégrité physique de celui-ci » telles qu’issue de la loi du 31/12/2012.

Le texte du 22/4/2018 ajoute simplement que l’immunité couvre également le « transport directement lié à l’une de ces exceptions ».

​Pour couvrir ces catégories d’actes, l’acte reproché devait n’avoir « donné lieu à aucune contrepartie directe ou indirecte » tandis qu’avec la nouvelle rédaction issue de la loi du 22/4/2018, l’immunité humanitaire est exclue si l’acte a « donné lieu à une contrepartie directe ou indirecte ou a été accompli dans un but lucratif. » 

Ainsi et comme auparavant, l’aide ne peut porter que sur des domaines précis, certes essentiellement humanitaires, mais elle doit être accordée sans contrepartie « directe ou indirecte » ce qui permet toutes les dérives.

La loi pénale fait courir un risque de poursuites pénales à tous ceux qui apportent leur aide humanitaire ou solidaire : Emmaüs dont les compagnons même sans papiers ont précisément pour mission de participer à la vie de la communauté, le Secours Catholique qui aide les sans-papiers et en contrepartie leur font distribuer les repas pour leur redonner une utilité sociale et une dignité, un particulier qui partage son logement avec un étranger démuni de titre de séjour, lequel achèterait quelques courses de temps à autres pour  garnir la table, ou  comme à Perpignan en 2015, cet hébergeant qui a laissé la personne ainsi accueillie passer la serpillère ou faire la vaisselle…

Introduire dans la définition de l’infraction le but lucratif était une idée lumineuse puisque ce but correspond enfin à la cible recherchée, c’est-à-dire ceux qui battent monnaie sur la détresse de ces étrangers en exil.

Mais conserver la notion de « contrepartie directe ou indirecte » permet de continuer l’intimidation de toute solidarité avec les étrangers en situation irrégulière en France.

Sans aller jusqu’aux poursuites devant le tribunal correctionnel, garde à vue, rappel à la loi, ordonnance pénale continueront d’entretenir la peur pour réduire autant que faire se peut l’élan pourtant naturel de fraternité envers les migrants.

Or c’est précisément la notion de fraternité qui a permis à la Cour de cassation de transmettre une QPC au Conseil constitutionnel le 9/5/2018 dans 2 affaires dans lesquelles la cour d’appel d’Aix-en-Provence avait condamné les prévenus (dont le désormais célèbre agriculteur Cédric HERROU) sur le fondement de l’article L622-1 du CESEDA.

Ce sont donc la fraternité, et les concepts de nécessité et de légalité des délits et des peines et d’égalité devant la justice qui pourraient obliger le législateur, contre son gré, à abroger enfin le délit de solidarité juste après son 80ème printemps.

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Le projet de loi "asile immigration": les idées du FN à la sauce Collomb - Macron

27/3/2018

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Pourquoi une nouvelle loi alors que la précédente du 7/3/2016 seulement (pleinement entrée en vigueur le 1/1/2017) n'a pas encore produit ses effets et n’a certainement pas pu faire l’objet d’une évaluation?

Qui y a-t-il dans cette loi qui permette de réunir contre elle militants des droits de l'homme, magistrats, avocats, associations, Défenseur des droits, Conseil d'Etat, femmes et hommes politiques de presque tous bords?

Les français n'ont-ils pas élu au second tour de la présidentielle le président Macron pour faire barrage au Front National et à ses idées?

Décryptage du projet de loi (PJL) qui sera débattu à l'assemblée nationale début avril 2018.
 
1. France, ex-terre d'asile.

« Mieux vaut répondre "non" vite, que répondre "non" après de longs mois ». Telle est la logique du PJL qui souhaite réduire à 6 mois le délai de traitement d'une demande d'asile.

Répondre plus souvent "oui" ne semble pas une option, alors que la France atteint péniblement un taux d'octroi du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire de 30%.

En Allemagne, le taux d'octroi est de plus de 50%. Nos demandeurs d'asile seraient-ils "moins bons" qu'ailleurs? La Convention de Genève qu'OFPRA et CNDA doivent appliquer serait-elle différente ailleurs?

Non. Le même texte international, les mêmes parcours d'exil forcé, mais pas la même réponse.

Il y aurait une avancée à aller plus vite en besogne si le PJL donnait les moyens matériels de le faire, ce qui n'est pas le cas. La célérité annoncée se fera par des moyens sournois.

D’ailleurs la CNDA s’est mise en grève. Les rapporteurs s’inquiètent notamment de la réduction prévue d’un mois à quinze jours des délais de recours, qui risque selon eux d’aboutir à des dossiers mal ficelés, plus fréquemment traités sans audience (26 % dont déjà jugés sur ordonnances) : « On fait primer le chiffre sur la qualité » selon les personnels les plus au fait de ce que le PJL implique concrètement pour les demandeurs d’asile.

Convocation par tout moyen et non en LRAR: un demandeur d'asile qui donne son numéro de téléphone portable en début de procédure mais qui en change ou le perd ne recevra jamais le SMS de convocation. Son dossier sera effectivement vite rejeté dans ces conditions.

Audition du demandeur d'asile en visioconférence et non physiquement sur place, sans possibilité de refuser cette manière de faire: aucune économie de temps sur cette mesure, mais moins de déplacements c'est exact. La justice a déjà adopté de tels procédés et le constat est terrible. Des procédures désincarnées et vides de sens, auxquelles les personnes concernées restent extérieures. Ici, le récit de l'exil en 16/9ème ne prendra jamais aux tripes comme peut le faire l'être humain qui raconte la torture et montre les blessures qu'il a pour seules preuves de son parcours de réfugié. Le rejet de sa demande n'en sera que plus confortable, plus froid aussi.

Délais exorbitants du droit commun et chausse-trapes de procédure pour piéger le demandeur d'asile comme ces 90 jours maximum après l'arrivée en France pour déposer sa demande en français. Dérouler tout ça est souvent très difficile. Il faut le faire de manière construite sous peine de rejet par ordonnance. Il faut le faire en français. Il faut le faire vite. Même si on dort sous un pont ou dans un abri à poubelles. Car en France, même les poubelles ont un abri.

Dans le PJL, pas un mot sur les moyens dédiés à l'hébergement qui devrait pourtant être fourni aux demandeurs d'asile selon les engagements internationaux sur lesquels la France s'assoit quotidiennement faute de dédier des moyens suffisants à ce devoir.

Par contre, il est bien prévu des mesures impératives de surveillance des demandeurs d’asile bénéficiant des conditions d’accueil, et ce sous peine de retrait. Gestion de la pénurie donc.

Le recours, qui devra être présenté en 15 jours seulement, sera non suspensif pour de très nombreux demandeurs d’asile, ce qui permettra d’éloigner l’étranger avant même le traitement de son recours par la CNDA. S’il sera possible de saisir un juge administratif (qui lui n’est pas spécialisé en matière d’asile) pour empêcher le refoulement, ce dispositif procédural supplémentaire est une «usine à gaz » dénoncée par les praticiens de la matière.

L’éloignement forcé sera facilité au terme de la procédure d’asile puisqu’il ne sera par principe plus possible pour l’étranger de faire valoir un quelconque droit au séjour pour d’autres motifs (sanitaires, humanitaires, ou familiaux), s’il ne l’a pas fait en même temps qu’il déposait sa demande d’asile. Là, c’est particulièrement vicieux comme dispositif puisque pour déposer une demande de titre de séjour, à la différence d’une demande d’asile, il faut un passeport. Or demander un passeport à son Etat d’origine est considéré comme un acte d’allégeance qui fait perdre la possibilité de bénéficier de l’asile. Le piège est, quel que soit le bout par lequel on le prend, diaboliquement parfait.

En réalité, plutôt que de vouloir accélérer par des moyens déloyaux le traitement de la demande d’asile une fois qu’elle a été enregistrée, mieux vaudrait réduire les délais d’enregistrement de la demande aujourd’hui bien trop longs. Mais là-dessus, pas un mot, car l’objectif n’est évidemment pas d’améliorer la situation des demandeurs d’asile mais bien de les dissuader, les piéger, les refouler.
 
2. Davantage de privation de liberté.

Le principe, c’est la liberté, l’exception, la détention. Sauf pour les étrangers.

L’assignation à résidence est le principe. On connaissait cela pour les déboutés d’asile, ou les étrangers dont la demande de titre de séjour est refusée et à qui on somme de quitter le territoire sans délai. Mais pour les étrangers à qui on refuse un titre de séjour et on donne un délai de départ volontaire, ce sera la règle.

Comme le Conseil d’Etat a critiqué la généralisation des assignations à résidence, on appelle ça la « contrainte de résider » dans un lieu déterminé. C’est aussi coercitif mais comme ça, ça passe.

La privation de liberté que constitue l’assignation à résidence (il faut rester en un lieu précis, avec des horaires de présence obligatoire, pointer plusieurs fois par semaine auprès des services de police, qui vont d’ailleurs être ravis de la charge inutile de travail supplémentaire) n’empêche pas l’Etat de prévoir massivement le placement en rétention administrative.

Pas d’assignation pour les demandeurs d’asile « dublinés », ni pour les personnes vivant dans des camps.

Et surtout une durée de rétention pouvant aller jusqu’à 135 jours contre 45 jours actuellement.

4 mois et demi de régime quasi-carcéral pourquoi ? Pas pour augmenter significativement l’éloignement effectif des étrangers puisque toutes les études d’impact corroborent le constat des associations intervenant dans les centres de rétention administrative : l’éloignement effectif intervient les 10 premiers jours et devient marginal après 30 jours. Le budget de la rétention va flamber (une rétention de 4 mois et demi, c’est 54 843 € par personne) sans que le taux d’éloignement effectif n’en soit augmenté sensiblement.

L’image de ces personnes, (y compris en famille, on n’a plus aucun tabou) inutilement enfermées va flatter l’électorat du FN, mais vaut-elle la dépense ?

3. Toujours moins de droits.

Les juges empêchent l’Etat d’expulser les étrangers s’il ne respecte pas leurs droits ? Changeons la loi pour qu’ils aient moins de droits et qu’il y ait moins de recours au juge.

Une telle logique amène à retarder le contrôle du juge sur la rétention de 24h. Et si le juge des libertés et de la détention libère l’étranger, on augmente à 10h le délai pendant lequel le parquet peut interjeter appel et pendant lequel l’étranger devra encore demeurer en rétention.

Les droits des personnes retenues ne s’exerceront plus qu’au centre de rétention et pas ailleurs, notamment pas pendant les déplacements que ce soit au consulat ou à l’hôpital. Autant de moyens de priver l’étranger de ses quelques possibilités de recours strictement encadrées dans des délais déjà excessivement courts.


Le tribunal administratif aura 96h pour statuer sur le recours de l’étranger frappé d’une obligation de quitter le territoire (24h de plus qu’actuellement, donc 24h de plus en rétention, c’est toujours ça de pris !).

Suivant la même logique, le juge des libertés et de la détention aura 48h voire 72h (contre 24h actuellement) pour statuer sur le sort de l’étranger qui lui est présenté.

Le jugement sur les affaires de ces étrangers déboutés d’asile qui auraient également formulé une demande de titre de séjour ne se fera pas en 3 mois en formation collégiale comme actuellement mais en 6 semaines à juge unique sans conclusions du rapporteur public. Moins de garantie procédurale avec l’espoir que les annulations de ces mesures d’éloignement soient moins nombreuses.

L’interdiction de retour qui permet d’éloigner l’étranger pendant une ou plusieurs années après une obligation de quitter le territoire est expressément prévue comme débutant seulement le jour où l’étranger a quitté le territoire de l’Union européenne. Docilement, la France applique les dispositifs dont la « forteresse Europe » s’est dotée mais qui ont simplement pour effet de contraindre les personnes à la clandestinité sans faire valoir les droits dont l’évolution de leur situation personnelle permettrait peut-être de faire bénéficier.

Au détour de ces dispositions présentées comme permettant plus d’efficacité des procédures, ont été glissées des mesures expérimentées à Mayotte et qui seront généralisées à toute la France pour empêcher la reconnaissance d’un enfant étranger par son père français ou d’un enfant français par un père étranger, au mépris du droit de l’enfant de connaître ses origines ou d’avoir une filiation paternelle conforme à la réalité de son quotidien d’enfant.

Un contrôle préalable à la reconnaissance de paternité par les officiers d’état civil (dont on sait qu’ils sont particulièrement zélés dans certaines communes de France) sera effectué, et permettra d’empêcher l’établissement du lien de filiation qu’autrefois on pouvait déjà annuler a posteriori s’il s’avérait frauduleux (fraude excessivement rare, il faut le rappeler). Les conditions pour que la reconnaissance soit autorisée sont plus nombreuses qu'avant.
​
Après avoir pendant des années empêché, dissuadé, complexifié les mariages « mixtes » entre français et étrangers sous couvert de lutter contre les mariages blancs, gris, ou simplement « pas bien français », voilà qu’on veut aussi les empêcher d’avoir des enfants.
​
Le FN avait prévu de le faire. Macron le fait.

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Maintenant, pour mettre en prison, il faut une réelle motivation.

29/11/2017

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Les prisons sont pleines, elles sont une honte pour la République, et pourtant, quand une peine de prison n’est pas la réponse pénale donnée à une infraction, d’aucuns exigent que les juges s’en justifient, les taxant volontiers de laxistes.

Comment s’étonner alors que les juges aient parfois du mal à exercer leur office face à de telles injonctions contradictoires


.L’article 132-19 du code pénal est venu dire depuis la loi du 15 août 2014 que « en matière correctionnelle, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ».

En dernier recours, si toute autre sanction est inadéquate… manifestement inadéquate.

Des peines adéquates, il en existe tant et plus grâce au législateur qui, lui, ne manque pas d’imagination, de ressources pour offrir à la justice une palette de sanctions dans laquelle ce serait bien un monde que le juge ne trouve pas dans la plupart des situations une réponse pénale adéquate autre que « prison, prison, prison ».

L’article 131-3 du code pénal les énumère et si la première des peines correctionnelles et effectivement la prison, il faut lire la suite pour se convaincre qu’elle n’est pas la seule réponse pénale possible.

La contrainte pénale, l'amende, le jour-amende, le stage de citoyenneté, le travail d'intérêt général, les peines privatives ou restrictives de droits prévues à l'article 131-6 , les peines complémentaires prévues à l'article 131-10, la sanction-réparation sont bien souvent des sanctions adéquates, adaptées, mais négligées au profit de la prison qui fait peut être du bien à celui qui la prononce mais qui, en pratique, quand elle n’aggrave pas les maux ne résout rien.

Quand vraiment, la gravité de l’infraction et la personnalité de son auteur rendent la peine d’emprisonnement nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate, alors le juge peut prononcer une peine d’emprisonnement ferme.

Mais le législateur a prévu un autre verrou pour sécuriser la porte de la prison.

La peine d'emprisonnement doit par principe faire l'objet d'une mesure d'aménagement de peine, "si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle".

Le juge qui, indifférent à l’inutilité voire la nocivité de la peine qu’il s’apprête à prononcer, ignorant de la surpopulation carcérale qui gangrène l’institution devenue à l’évidence criminogène, décide d’avoir recours à la peine d’emprisonnement sans sursis et se refuse à aménager cette peine devra « spécialement motiver sa décision, au regard des faits de l'espèce et de la personnalité de leur auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale ».

Et pas par un simple copier-coller des motifs par lesquels il a décidé de la peine de prison.

Comme l’avalanche de textes législatifs en la matière ne permet guère de savoir si le législateur est sérieux quand dans ce seul article 132-19, il semble contredire la grande sévérité qu’il réclame souvent, la Cour de cassation s’est attelée à faire de la pédagogie auprès des juges depuis un an.

Un revirement important de jurisprudence amène désormais la Cour de cassation à contrôler de manière particulièrement exigeante la motivation retenue par les juges laquelle va devoir être moins laconique que jusqu’alors.

Dans une série d’arrêts (Crim 29/11/2016 15-86.712, 15-86.116, 15.83.108 ; Crim 10/5/2017 15-86.906 ; Crim 28/6/2017 15-86.475), la Cour de cassation nous confirme qu’il va falloir appliquer à la lettre l’article 132-19 du code pénal.

Aux avocats d’exiger la rigueur intellectuelle de ceux qui finissent parfois et sans bien réfléchir par "distribuer" les peines quelle que soit la personne, quels que soient les faits, quelle que soit la situation matérielle, familiale, sociale et quelle que soit la loi finalement.

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La détresse d'un enfant et de sa famille n'a pas de frontière. L'humanité n'a pas de loi.

7/12/2016

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Le Tribunal administratif de Grenoble a censuré la discrimination opérée par le Conseil Départemental de l'Isère (présidé par un élu de "Les Républicains") lequel violait tranquillement la loi de la République.

Jusqu'alors, conformément au code de l’action sociale et des familles (CASF), il versait une aide financière aux familles en détresse sans discriminer les ressortissants étrangers.

La détresse d'un enfant et de sa famille n'a pas de frontière et l'humanité n'a pas de loi.

Cette aide est ponctuelle, limitée et permet de couvrir une toute petite partie des besoins de première nécessité.

Mais la droite départementale a voté des mesures pour se distinguer de la majorité précédente, empruntant un chemin qui mène sans vergogne à la discrimination à raison de la nationalité des personnes en détresse ainsi qu'à raison de leur situation administrative.

Elle a supprimé la possibilité de versement de cette aide financière aux familles démunies de titre de séjour, comme si leur détresse était moindre alors qu'au contraire, n'ayant pas de le droit de subvenir à leurs besoins par leur travail faute d'autorisation de travailler, ces personnes sont exposées à des conditions de vie encore plus rudes.

La plupart de ses familles a d'ailleurs un droit au séjour en France sans toutefois encore avoir de titre de séjour pour le consacrer.

Le tribunal administratif de Grenoble par des jugements du 6/12/2016 (un exemple ci joint) annule les décisions de refus de versement de ces aides en retenant que les nouvelles règles établies par le Conseil Départemental de l'Isère sont illégales.

Il juge que "les prestations d’aide sociale à l’enfance sont attribuées aux ressortissants étrangers sous les mêmes conditions que pour les personnes de nationalité française sans qu’il soit possible de distinguer entre les demandeurs étrangers en situation régulière en France et les autres".

Or l’article 3.1.1.1.4 du règlement de l’aide sociale à l’enfance du département de l’Isère, dans sa rédaction adoptée par la commission permanente du département du 26 février 2016 autorisait le versement d’aides financières, pour les ménages de nationalité française et de nationalité étrangère disposant d’un droit au séjour en France.
 
En revanche, ce même article renvoyait les ménages qui n’ont pas droit au séjour en France aux associations caritatives dont on sait les moyens de plus en plus limités.

Le Conseil départemental, à la suite des actions en justice engagées par les personnes lésées, a changé son règlement sans attendre son inévitable condamnation.

Par délibération de la commission permanente du 22 juillet 2016, il a supprimé la distinction opérée entre les ressortissants étrangers sans droit au séjour et les autres demandeurs.

La nouvelle majorité du Conseil Départemental de l'Isère souhaiterait sans doute que la loi de notre pays soit moins "généreuse" avec l'enfance dans le besoin lorsqu'elle est étrangère.

Pour l'instant, tel n'est pas le cas: "égalité" et "fraternité" figurent encore dans la devise républicaine, n'en déplaise à Les Républicains.

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Convoqué(e) pour une audition libre ou une garde à vue? Vite, un coach!

27/9/2016

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Il y a encore plus de 300.000 gardes à vue chaque année en France malgré les récentes réformes tendant à en restreindre l’usage.

Outil majeur de l’enquête de police ou de gendarmerie, le cadre légal pour entendre un suspect, une personne soupçonnée, voire un simple un témoin a considérablement évolué en quelques années notamment par le poids de la Cour européenne des droits de l’homme et la force de la profession d’avocat.


La Cour de cassation, le Conseil constitutionnel ont amené progressivement par leur jurisprudence à accepter quelques avancées vers plus de modernité et à respecter un peu mieux les standards des droits fondamentaux que respectent les grandes démocraties (lesquelles ont, par exemple, pris la directive 2012/13/UE du Parlement européen relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales que la France a péniblement transposée par une loi du 11 juin 2016).

Tout cela sans sérieusement nuire à l’enquête qui s’intéressera davantage aux éléments autres que l’aveu, « reine des preuves », si fragile pour établir le crime.

Concrètement, une personne est désormais entendue librement ou dans le cadre d’une garde à vue dont le régime juridique diffère mais dont le but est le même : recueillir des explications du suspect ou de la personne soupçonnée.
Hors le cas d’une arrestation, cela peut commencer par une convocation de police qui en pratique donne bien des indications à son destinataire et lui permet de se préparer à ce qui est tout sauf anodin.

Depuis le 1er janvier 2015 et en application de l’article 61-1 du Code de procédure pénale, la convocation pour une audition libre de la personne soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre une infraction doit indiquer l’infraction dont elle est soupçonnée et son droit d’être assisté par un avocat.
Ainsi, toute autre convocation sans une telle mention laisse nécessairement penser qu’il s’agira d’une garde à vue, et non d’une audition libre.

« Le mot que tu retiens entre tes lèvres est ton esclave. Le mot que tu as dit est ton maître. » : pour autant selon le Code de procédure pénale, le droit au silence, celui de ne pas s’auto-incriminer n’a pas à être rappelé dans la convocation ainsi faite.

Ce droit sera néanmoins rappelé par l’enquêteur avant l’audition libre proprement dite conformément aux dispositions de l’article 61-1.

L’avocat permettait d’obtenir cette information dans le cadre du simple « entretien de courtoisie » qu’il avait avec son client avant la réforme du 14 avril 2011.

Le fait que l’avocat assiste désormais son client pendant les interrogatoires rend effectif l’exercice de ce droit. L’enquêteur n’a guère d’espoir de faire renoncer au silence celui qui, fort du soutien juridique de son avocat, a décidé d’exercer ce droit fondamental.

C’est la même logique pour celui qui décide de répondre aux questions. Répondre aux questions ne signifie pas répondre à toutes les questions, même les plus insidieuses, de celles qui vous feraient dire le contraire de ce que vous souhaitez expliquer.

« Chercher à se justifier quand on n’est pas coupable, c’est s’accuser » : il y a donc souvent un stade à partir duquel il faut savoir mettre un terme à l’interrogatoire ou en rendre la poursuite complètement vaine.

Et tout au long de l’interrogatoire, il y a des vigilances qu’une personne non avisée ne pourra bien sûr pas avoir.

La convocation écrite préalable est désormais prévue par la loi (« si le déroulement de l’enquête le permet », selon le texte).

Ainsi c’est toute la panoplie des droits qu’une personne appelée à se rendre dans un commissariat de police ou une gendarmerie viendra chercher au préalable chez son avocat.

C’est en pratique ce qu’elle fait le plus souvent.

Nombres de personnes exposées à un risque pénal par leurs fonctions ou par hasard tirent le meilleur parti à apprendre les rouages de la procédure pénale, les astuces pour « bien vivre » la garde à vue ou réduire la durée d’un interrogatoire et en optimiser le contenu.

Tant et si bien que les cabinets d’avocats faisant référence en la matière ont mis en place des formations destinées à faire face au risque pénal.

Elles répondent à un besoin. Elles découlent des réformes tendant à renforcer les droits de la défense et l’équilibre de la procédure pénale.

Chefs d’entreprise, responsables publics ou privés, particuliers exposés à un risque pénal peuvent ainsi se former sur leurs droits et les bons réflexes pour se prémunir ou se défendre du risque pénal de leur activité.

Sur site ou en cabinet d’avocat, ces « kits de survie du pénaliste » permettent de connaître le cadre légal de l’audition libre et de la garde à vue (qui, quand, pourquoi ? Quels pouvoirs et quels droits ?), de savoir comment se préparer, bien gérer un interrogatoire, et avoir les bons réflexes après et enfin d’avoir une évaluation personnalisée de chacun des participants sur leurs risques particuliers, leurs atouts, leurs faiblesses dans la procédure pénale.
​

« Un homme averti en vaut deux ». Ce qu’il y a de bien maintenant, c’est qu’on est prévenu.
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Contrôle de l'action des forces de l'ordre:  police partout, justice nulle part.

6/4/2016

 
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Saluons le mérite des forces de l'ordre dont la tâche est rendue d'autant plus difficile que leurs effectifs ont connu une baisse sans précédent lors du précédent mandat présidentiel. Rappelons tout de même les carences du système législatif permettant de contrôler leur action.

L’action des forces de l’ordre est par nature brutale face au désordre, au trouble à l’ordre public ou à la commission d’un crime.

Les coups de bâton donnés généreusement pour disperser des manifestants, le jet de bombe lacrymogène, le tir potentiellement létal même s’il est réglementairement dirigé d’abord sur des organes non vitaux, autant d’actions que la loi permet aux policiers ou gendarmes d’effectuer en toute impunité.

L’ « usage de la force strictement nécessaire » : c’est toujours en ces termes que le débat judiciaire est posé en cas de violences policières.

Pour les uns, un coup gratuitement donné à un manifestant soumis sera l’usage de la force strictement nécessaire pour les autres.

Chacun a raison de son point de vue. La frontière est parfois ténue entre la violence légitime et la brutalité de trop.

L’état  d’urgence (qui a grandement facilité l’action des forces de l’ordre par une absence presque totale de contrôle judiciaire) et ses perquisitions traumatisantes pour ceux qui les ont subies, ou encore les manifestations populaires autour du projet de réforme du code du travail portée par la ministre EL KHOMRI, sans parler de la tragédie dont a été victime Rémi Fraisse ont donné quelques exemples pratiques des limites de la législation française. Une fois encore.

Des décennies que la France prête le flanc à la critique par une règlementation parfaitement défaillante.

Quand l’opportunité de la violence doit être jugée, la question de la preuve des gestes effectués par les uns ou les autres est évidemment centrale.

Dans l’espace public, peut être évacué  plus aisément le problème de la preuve qui se pose réellement lorsque les faits se sont déroulés  à l’intérieur d’un commissariat ou d’une caserne de gendarmerie ou d’un lieu clos sans regard extérieur.

Les technologies modernes  fixent les faits que la justice doit ensuite qualifier.

C’est principalement les enregistrements d’images par des témoins de la scène. Demain peut être par les policiers eux-mêmes équipés d’une « caméra piéton » à la condition qu’ils activent l’enregistrement. Les caméras de vidéosurveillance de manière accessoire lorsque leurs images sont exploitables (ce qui est rare) et exploitées (ce qui l’est tout autant).

Quand les images n’existent pas ou qu’elles sont équivoques, le recueil des témoignages des victimes, témoins et auteurs reste la seule méthode d’établissement des faits.

Et c’est là que le bât blesse.

En procédure, la victime est entendue le plus souvent par l’auteur ou ses collègues au mépris des règles d’équité les plus élémentaires.

Dans le meilleur des cas, elle le sera en qualité de victime, et sinon comme mis en cause pour outrage et rébellion, infractions facilement relevées.

Il est assez rare en effet que la victime se laisse molester injustement sans l’ouvrir, ou sans tenter d’échapper aux coups.

En France, toujours pas d’enquête officielle effective par un organe indépendant. Au mieux, la classique enquête de l’IGPN ou de l’IGGN. Or l’enquête « maison » dont on connaît souvent par avance les conclusions n’est pas l’enquête réclamée depuis des décennies par les organes de défense des droits de l’homme.

Amnesty International acquiert ses lettres de noblesse lorsqu’elle se penche sur la situation de pays étrangers à la France. Elle est vilipendée lorsqu’elle publie des rapports accablants sur l’état de notre droit français en la matière (http://www.amnesty.fr/Documents/Rapport-France-Des-policiers-au-dessus-des-lois).

L’ACAT fait l’objet des pires accusations lorsqu’elle mène une enquête rigoureuse pour, non pas critiquer la police dont tout le monde s’accorde, particulièrement en ces temps troublés, à dire qu’elle est utile et même insuffisante, mais pour faire plus de transparence sur les pratiques que l’on souhaiterait tous, y compris dans les rangs des forces de l’ordre, être d’un autre âge et y rester (http://www.acatfrance.fr/action/violences-policieres---exigeons-la-transparence).

Ce que ces organisations préconisent n’est rien d’autre que ce que les engagements internationaux de la France, telle la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, imposent.

L’article 13 de la CEDH prévoit que :
« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles. »

La Cour européenne des droits de l'homme a condamné la France à plusieurs reprises, notamment dans deux arrêts retentissants, pour des traitements inhumains et dégradants commis à l'occasion d'une mesure de garde à vue (Tomasi c/ France, CEDH 27 août 1992 et Selmouni c/ France, CEDH 28 juill. 1999).

La Cour considère que lorsqu’un individu affirme de manière défendable avoir subi, aux mains de la police ou d'autres services comparables de l’Etat, de graves sévices illicites, il faut qu’il y ait une enquête officielle effective. (Assenov c. Bulgarie C.E.D.H. 28 octobre 1998).

Sans une telle enquête, «il serait possible dans certains cas à des agents de l’Etat de fouler aux pieds, en jouissant d’une quasi-impunité, les droits de ceux soumis à leur contrôle ».
 
Le Défenseur des Droits, dont la France a fini par se doter, assure un rôle certes fondamental pour effectuer une enquête indépendante et impartiale qu’il mène en plusieurs mois, plusieurs années parfois.

Il est lui aussi critiqué par ceux-là même dont il démontre les exactions (http://www.alternativepn.fr/pages/communique.html).

Néanmoins, il n’empêche pas les comparutions immédiates des victimes de violences policières que la justice est prompte à condamner pour outrage et rébellion dans le cadre de procédures inéquitables et expéditives.

Sa sagesse, lorsqu’elle est seulement écoutée, passe après que l’action publique ait fait son œuvre.

Il n’empêchera pas davantage les dérives liées à l’assouplissement des conditions dans lesquelles les forces de l’ordre pourront faire usage de la force strictement nécessaire, y compris létale, jusqu’alors réserver à des situations de grave danger, actuel en légitime défense ou imminent en état de nécessité (article 19 du projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale).

La police est partout et quand elle protège, elle est la bienvenue.
​
La justice n’est nulle part lorsqu’elle ne permet pas de faire la lumière sur les excès des forces de l’ordre.

La peine du vieux détenu.

6/11/2015

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Il a fallu la loi dite DATI du 24 novembre 2009 pour que les détenus âgés bénéficient selon des conditions assouplies d'un aménagement de leur peine.

L’article 729 du code de procédure pénale fixe les règles d’octroi de la libération conditionnelle et son dernier alinéa précise le cas des détenus âgés de plus de 70 ans :

«Lorsque le condamné est âgé de plus de soixante-dix ans, les durées de peines accomplies prévues par le présent article ne sont pas applicables et la libération conditionnelle peut être accordée dès lors que l'insertion ou la réinsertion du condamné est assurée, en particulier s'il fait l'objet d'une prise en charge adaptée à sa situation à sa sortie de l'établissement pénitentiaire ou s'il justifie d'un hébergement, sauf en cas de risque grave de renouvellement de l'infraction ou si cette libération est susceptible de causer un trouble grave à l'ordre public. »


Détenu à 70 ans. Il faut chercher le sens de la peine à cet âge là.

Une punition? Les problèmes de santé la font relativiser.

Les établissements pénitentiaires ne sont pas adaptés à un public âgé et c'est la raison consensuelle retenue pour justifier la mesure "de faveur".

Or, disons le, à cet âge, le risque de récidive est plus que théorique.

Pour l'aménagement d'une peine de prison ferme, on ne saurait, comme pour les détenus "ordinaires", poser trop de conditions liées à des efforts de réinsertion.

Trouver un logement (adapté à l'âge et à la dépendance) est donc pratiquement la seule condition, souvent déjà assez difficile à remplir.

Evidemment, c'est une importante distorsion par rapport aux autres détenus qui doivent notamment avoir accompli la moitié de leur peine.

Ce qui amène d'ailleurs parfois à estimer "prématurée" une demande d'un vieux papy candidat à la libération conditionnelle dans ces conditions.

Sauf que c'est l'esprit de la loi.

La plus grande difficulté pour son application, c'est la modification du système de pensée des agents du SPIP (service pénitentiaire d'insertion et de probation), voire des magistrats (procureurs naturellement mais de manière plus surprenante juges d'application des peines).

La frilosité parfois constatée dans l'application, au nom du peuple français, de la loi votée par ses représentants tient sans doute à l'écho médiatique démesuré des rares cas de réitération d'infractions de condamnés en aménagement de peine, d'autant plus rares qu'ils sont âgés.

Pourtant, les victimes, l'opinion publique seraient troublées d'apprendre que des cas de récidives auraient scandaleusement pu être évités si la loi avait simplement été appliquée et que, sans cette crainte irrationnelle, un aménagement de peine avait été octroyé.

La libération conditionnelle permet de réduire considérablement le risque de récidive. Plus elle est mise en place tôt dans l'exécution de la peine, plus elle est efficace. Plus la personne qui en bénéficie est âgée et plus la récidive diminue.

Il est vrai que les données criminologiques existantes et propres à apaiser cette crainte irrationnelle de la récidive ne sont pas diffusées par les grands médias populaires à l'occasion de faits divers à fort impact émotionnel.

On l'a vu au sujet des permissions de sortir récemment: avocats ou magistrats "rament" (sans démériter) lorsqu'il s'agit de convaincre le grand public de se défaire des idées savamment distillées par les lobbies de la sécurité et de la peur. Juges et parties, leur science est rapidement discréditée comme partisane, aussi fantaisiste que soit l'idée qu'ils soient des mercenaires du mal contre le bien.

Comme après un crash aérien, des experts viennent au JT de 20h rappeler que l'avion est le moyen de transport le plus sûr, à quand l'interview d'une Annie KENSEY (Prison et Récidive - Ed. Armand Colin) à la suite d'un sujet sur un crime abominable passant en boucle sur tous nos écrans ?
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