Nous sommes tous Charlie!
Vraiment ? Alors pourquoi un sentiment de "deux poids deux mesures" empêche certains de se sentir membres à part entière de la communauté des Charlies? Illustrations au prétoire: comparutions immédiates pour apologie du terrorisme alors que l'infraction ne tient pas, peines de prison (ferme ou pas) distribuées dans un malaise général, flexible droit qu'on tord pour trouver de force une réponse à un phénomène de société. Et dans le même temps, toujours la même cécité sur les infractions qui relèvent du racisme. Depuis des années. Deux poids, deux mesures. Exemple : soirée de beuverie, à Grenoble. Il est tard et ça braille dans les rues. Intervention de la police municipale. Faut rentrer Monsieur, il est tard et vous faites trop de bruit. Une petite phrase contre le Président Hollande et les impôts. Et puis la provocation écervelée d'un "je suis Charlie Coulibaly". Premier poids, première mesure dans cette affaire. Comparution immédiate. On reproche, le doigt sur la couture du pantalon une apologie du terrorisme. Embarras dans la salle d'audience quand le prévenu parle comme nous, pense comme nous, est un des nôtres, pas un des autres. Sans se démonter, le Tribunal fait une pirouette pour sauver la face judiciaire de cet épisode de société. Requalification en violence contre les policiers municipaux, les pauvres, qui auraient reçu ces mots comme des coups.S'étaient ils plaint? Non, ils ont parfaitement compris, eux. Le parquet en appel obtient même qu'enfin on dise que c'était bien de l'apologie. Autre poids, autre mesure dans une autre affaire. De jeunes hommes font une soirée dans un appartement à Echirolles, banlieue grenobloise. Leur vient l'envie de tirer gratuitement sur des automobilistes avec une carabine munie d'une lunette de précision. Projectiles traversant nez et gencive, épaule, poumon, estomac de conducteurs qui n'ont eu la vie sauve que par pure chance et qui tous sont d'origine maghrébine. Lors de leur arrestation, l'un des tireurs reprochera aux policiers de faire les cow-boys en arrêtant des blancs, alors que, eux, ont les couilles de s'en prendre aux arabes. Aucune poursuite pour une infraction à caractère raciste, circulez, y 'a rien d'autre à voir que de la bêtise ordinaire selon le Parquet. La politique pénale, qui dans un cas est bien prompte à voir l'apologie de terrorisme et dans l'autre reste aveugle à ce qui crève les yeux, fait litière d'une composante de la devise républicaine: égalité. Non, la justice n'est pas la même pour tous. Alors de quoi a-t 'on besoin ? De plus de lois? Pour lutter contre le terrorisme, son apologie y compris par internet ? L'encre du code pénal et du code de procédure pénale à peine sèche de la précédente réforme ? Et si on avait simplement besoin de se calmer et de reprendre ses esprits? Et de juger sans préjugé...
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Le blogActualité juridique par Claude COUTAZ, avocat. Archives
Décembre 2023
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